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Photo du rédacteurClément Martin

Le Carrefour du Cinéma d'Animation 2024 a du piquant !

Dernière mise à jour : 29 nov.


L'épinette, écran d'épingles conçu par Alexandre Alexeieff et Claire Parker était exposé dans la salle 300 du forum des images. Pierre-Luc Granjon, Justine Vuylsteker, ont préparé une image pour l'occasion.

On peut voir également les outils qui servent à imprimer des motifs sur l'écran. Photo Clément Martin

Le Carrefour du Cinéma d'Animation 2024 a lieu depuis le 22 novembre pendant 8 jours au Forum des Images à Paris avec une magnifique programmation de courts-métrages, de films en avant-première, de conférences, de longs-métrages du monde entier et d'une quasi complète rétrospective des films d'Animation de Jean-François Laguionie.

La journée de samedi ne manquait pas de piquant avec la rencontre "L'écran d'épingles se dévoile".


Les réalisateurs Pierre-Luc Granjon, Justine Vuylsteker, les intervenants du CNC Sophie le Tétour et Jean-Baptiste Garnero et Isabelle Vanini, délégué générale de l'AFCA nous ont entretenu de l'écran d'épingles. Photo Clément Martin

D'Alexeieff à Michèle Lemieux

Les participants nous ont d'abord présentés l'histoire de cet instrument si particulier et de sa transmission aux générations suivantes.

L'écran d'épingles est un instrument singulier qui a été inventé dans les années 30 par le graveur Alexandre Alexeieff et l'ingénieure Claire Parker. L'épinette présentée ici est un des 7 écrans qu'ils ont construits. Alexeieff et Parker ne souhaitaient pas partager leur invention et être les seuls à réaliser des films sur l’écran d’épingles. Le cinéaste d'animation Norman McLaren qui avait fait la connaissance du couple à l'Office National du Film dans les années 40 craignait que ce savoir-faire disparaisse et insistait pour que l'ONF en acquiert un exemplaire. Alexeieff-Parker construiront à la fin des années 60 un mini écran d'épingles (10 000 épingles) pour l'ONF le "baby screen".

Images entre 65 et 67 sur le tournage de "La télévision est là" film d'André Martin ONF 1967.

Photo Collection Geneviève et André Martin.


Puis l'ONF fait l'acquisition du NEC (240 000) épingles en 1972. C'est grâce à cet écran NEC qu'un jeune réalisateur, Jacques Drouin en apprivoisera la technique et les contraintes sur lequel il réalisera plusieurs films.

L'article "Jacques Drouin, l'apporteur d'épingles (1943-2021)  : passion et transmission." consultable sur https://www.gamca.info/post/jacques-drouin-l-apporteur-d-épingles-1943-2021-passion-et-transmission revient sur le parcours de Jacques Drouin comme réalisateur et passeur généreux et passionné de savoir-faire et de techniques.

Jacques Drouin avec Alexandre Alexeïeff au festival d'Ottawa en 1976 Collection CNC, fonds Alexeïeff / Parker, donation Alexeïeff-Rockwell.

Jacques Drouin s'est impliqué dans la transmission des techniques de l'instrument pour en assurer la pérennité. C'est Michèle Lemieux illustratrice et réalisatrice québécoise qui a pris le relais à Montréal accompagnée par Jacques Drouin et qui réalisera son premier film sur l'écran d'épingles. Elle nous a offert cette année le somptueux "Le Tableau". Ce filme traite de la rencontre de Michel Lemieux avec la reine Marie-Anne d'Autriche au travers d'un portrait peint en 1652 par Vélasquez.

Michèle Lemieux et Jean-Baptiste Garnero aux rencontres de Fontevraud le 19 octobre dernier. Michèle Lemieux est revenu sur son parcours et sur le processus de réalisation du tableau.

Photo Clément Martin

Image de "Le tableau" Michèle Lemieux 2024 11' - Image https://www.onf.ca/film/le-tableau/


Attention une transmission peut en cacher une autre

Jacques Drouin ne s'est pas arrêté là pour assurer la pérennité de la création sur cet instrument. Il est à l'origine d'un long chemin qui nous a mené à la présentation d'aujourd'hui.

Dès 2007 Jacques Drouin a effectué un premier "sauvetage" de l'épinette (270 000 épingles) qui était entreposé en France sans maintenance avec le support du CNC.

En avril 2010 Jacques Drouin a effectué un mémorable atelier au forum des images pour promouvoir l'usage de l'épinette qui n'avait plus servi depuis presque 40 ans.

En 2012, le CNC fait l'acquisition de l'épinette auprès de la fille d'Alexandre Alexeieff, Svetlana Alexeieff.

C'est ensuite Michèle Lemieux qui a accompagné le CNC en 2013 et 2014 dans la restauration de l'instrument et qui a formé Sophie le Tétour et Jean-Baptiste Garnero à la manipulation, l'entretien et la conservation de l'écran.

L'épinette était prête pour reprendre du service et c'est en juin 2015 à Annecy, que Michèle Lemieux a animé un stage de formation à l'épinette auquel ont participé : Florence Miailhe, Pierre-Luc Granjon, Justine Vuylsteker, Clémence Bouchereau, Florentine Grelier, Céline Devaux, Nicolas Liguori, Cerise Lopez. Jacques Drouin avait tenu à échanger avec les stagiaires par internet.

Nous avons pu voir un petit extrait filmé à cet occasion et qu'on peut retrouver dans "Pourquoi l'écran d'épingles" de Brice Vincent qui sera projeté le mardi 26 novembre à 20 h 30 en présence du réalisateur au forum des images.

Toutes les personnes de cette présentation étaient présentes pour ce stage et on a pu sentir l'émotion et l'excitation d'avoir participé à ce lancement de la transmission de l'Art de jouer de l'instrument écran d'épingles, ce stage où Michel Lemieux insistait plus sur ce qu'il ne faut pas faire laissant libre court à l'approche créative de chaque artiste.

Pierre-Luc Granjon, Justine Vuylsteker et Florentine Grelier ont présenté les tests qu'ils avaient réalisé lors de ce stage. On a pu voir également le magnifique 25, passage des oiseaux de florence Miailhe qu'elle a réalisé lors d'une résidence de 1 mois.On y retrouve avec bonheur son univers de beautés et de menaces mais cette fois-ci sans couleur. Le Maître de la peinture animée a su dompter l'écran d'épingles avec une rapidité surprenante.

25, Passage des oiseaux de FlorenceMiailhe.


La réalisatrice et enseignante sur le cinéma d'animation, Florentine Grelier nous a parlé de son test et de son projet de film sur d'écran d'épingles sur une approche ondulatoire de l'eau et des vagues avant la projection de son test.

Florentine Grelier durant la présentation - Photo Clément Martin


Le premier film

Même si "le test" de Florence Mihailhe est un court-métrage achevé et remarquable, il reste un test ce qui en limite malheureusement la diffusion. L'accès à l'épinette est un long périple où l'on peut attendre plus de dix ans ... quand on a de la chance, pour disposer de l'instrument pour un long chemin solitaire ! C'est Justine Vuylsteker qui a eu le privilège de réaliser le premier film officiel réalisé sur l'écran d'épingles en France depuis 40 ans avec "Etreintes".

Justine nous a confié avec un trait d'humour doublé de modestie non dénuée de fierté, qu'elle a été la première car elle n'avait pas de projet particulier dans sa vie à ce moment-là. Elle était donc disponible pour cette aventure solitaire que constitue la création des images d'un film sur l'écran d'épingles.

Les deux réalisateurs nous ont exprimé ce rapport intime à l'instrument dans une salle presaue qu'obscure avec une proximité physique obligatoire tant celui-ci exige de précises contorsions. Ce rapport mi-lutte, mi-complice, donne une telle force au résultat qu'on se laisse emporter dans une intrigue dont les péripéties sont autant d'accidents, d'opportunités de création qui vous marque à jamais. Justine Vuylsteker nous confiait qu'elle a fait "une dépression post-écran d'épingles" tant les autres techniques lui paraissaient fades après ce film .

Justine Vuylsteker nous parle de son expérience dur l'écran d'épingles. Photo Clément Martin


Justine Vuylsteker nous a amené son seul élément préparatoire au film constitué d'une succession de plan que l'on retrouve dans le film.

Il ne faut pas être moins de trois pour déplier cette bande graphique. Photo Clément Martin

Bande graphique de Justine  Vuylsteker détail - Photo Clément Martin


On a pu voir le film sur le bel écran de la salle 300 du forum des images pour y trouver un film d'une sensualité aussi fine qu'absolue. Justine Vuylsteker nous a parlé de la surprise qu'elle a eu avec l'instrument sur les surfaces presque blanches et les jeux abstraits qu'elle a pu mettre en place entre nuages et corps.

On peut voir une bande annonce du film sur https://www.youtube.com/watch?v=SInt4pIzN7E



Le dernier film

Le court-métrage "Les bottes de la nuit" de Pierre-Luc Granjon va sortir en février 2025. On découvre la magie de multiplier les créateurs sur cet instrument. Pierre-Luc Granjon nous offre ici le premier film pour enfants sur écran d'épingles. Le réalisateur qui est connu pour ces films d'animation en volume, "stop motion" pour les anglophiles :-), nous montre ici la petite escapade d'un enfant le soir dans la forêt et sa rencontre avec un drôle d'animal qui lui montre les secrets de la forêt avec ses monstres réels ou non.

Pierre-Luc Granjon nous a montré des dessins préparatoires. Il avait pris soin lors de présentations de son dossier pour obtenir les budgets de réalisation de préciser que "les dessins étaient beaucoup moins beaux que le futur rendu sur l'écran d'épingles".

Pierre-Luc Granjon nous présente le processus de conception de son film - Photo Clément Martin

Le résultat sur l'écran d'épingles avec plus de douceurs et de nuances. Image https://antoinerodet.com/25-2/les-bottes-de-la-nuit/

Le petit garçon et le drôle d'animal tout content de trouver un compagnon qui lui fait découvrir la forêt. Image https://cafedesimages.fr/films/les-bottes-de-la-nuit-8/

La complicité qui se crée entre le petit animal et le petit garçon. Image https://www.fif-85.com/film/tous-a-leau/


Grâce à Pierre-Luc Granjon l'écran d'épingles va à la rencontre d'un nouveau public, 92 ans après la naissance de cette invention !


Les créateurs à l'œuvre

Cette présentation si dense, avec de nombreux extraits et témoignages, nous a aussi offert le privilège de voir les créateurs à l'œuvre, de les voir "jouer" de l'instrument pour la construction "d'une" image.

Pierre-Luc Granjon et Justine Vuylsteker en plein exercice. Photo Clément Martin

L'image finalisée par nos deux artistes, vous reconnaitrez leur style ! - Photo Pierre-Luc Granjon.


Et ce n'est pas fini !

Nous avons pu voir le film de Pierre-Luc Granjon hier à la séance de 17 h30.

Alexandre Noyer a fait son atelier écran d'épingles hier également avec tellement de demandes qu'il y aura un nouvel atelier à planifier. Alexandre Noyer a su construire de nouveaux écrans différents mais plus modernes et les vocations pour cette technique naissent dans le monde entier. Les Stradivarius Alexeieff -Parker sont entre de bonnes mains ... les violons aussi ! :-)

Atelier écran d'épingles animé par Alexandre Noyer, le 24 novembre au Forum des images.

Photo Clément Martin

Le carrefour du cinéma d'animation a du piquant et il reste deux séances à ne pas manquer :

  • Mardi 26 novembre à 18 h 00 au forum des images "Voyage dans les courts-métrages de Michèle Lemieux et Jean-François Laguionie.

  • Mardi 26 novembre à 2àh30 au forum des images, le très beau Pourquoi l'écran d'épingles en présence du réalisateur Brise Vincent pour tout savoir, ou presque, sur l'écran d'épingles.


Remerciements

Merci au CNC, au forum des Images et à tous les participants pour cette magnifique séance pleine de découvertes et d'émotions.

Au CNC, la gestion du patrimoine n'est pas un vain mot et c'est grâce la passion de ses acteurs qu'aujourd'hui, on sent un puissant mouvement de réalisations, de styles différents en marche ! Bravo !


Jean-Batiste Garnero et Sophie le Tétour du CNC - Photo Pierre-Luc Granjon

Oui la gestion du patrimoine n'est pas un vain mot au CNC, on va jusqu'à assurer le transport de trésors !

Le CNC assure le transport sécurisé du trésor ! - Photo Clément Martin


A lire :

(1) le superbe article sur l'écran d'épingles du CNC : https://www.cnc.fr/cinema/actualites/lecran-depingles-alexeieff--parker_1219853


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